Kawaï

Il y a quelques semaines, j'ai emmené mon tout-petit dans une délicieuse cantine, Da Rosa, rue Jacob. Evidemment, Niels ne pouvait pas goûter aux redoutables jambons espagnols et italiens servis là-bas. Moi, si. Et je pouvais même goûter le vin, Niels étant sevré.

J'ai allongé Niels sur la banquette en velour rouge. Il dormait. Il était 14h30. Il n'y avait presque plus personne à l'étage, sinon une touriste japonaise qui décryptait méticuleusement le menu à l'aide d'un traducteur électronique. Je pris un risotto au riz noir et petits légumes, accompagné de tranches d'un somptueux jambon italien. Elle prit la même chose, précédé d'une soupe. Le risotto était renversant, corsé comme j'aime, plein de saveurs terrestres. Je me dis que c'était peut-être fort en goût pour une Japonaise. On pouvait y ajouter une huile d'olive parfumée et du parmesan râpé. Je le fis. La Japonaise aussi.

Elle prit son risotto en photo. Niels se réveilla. Il bût goulument son biberon puis prit comme à son habitude un air de ravi de la crèche. La Japonaise sourit. "He's cute", me dit-elle. "Kawaï in japenese". J'appris alors qu'on disait "kawahi", en appuyant sur le "i" et non "kawaille" comme je le pensais. Elle se mit à chanter une chanson en japonais à Niels, qui sourit. Je lui demandais combien de temps elle allait rester à Paris. "Five days". - It's short. - Oui, oui, répondit-elle. Elle me demanda si elle pouvait prendre Niels en photo. Bien sûr. Puis elle rangea son appareil dans son sac, à côté de son plan de Paris. Elle allait se rendre au jardin des Tuileries.

Je pense à elle aujourd'hui.